Contrairement aux faibles manifestations organisées au cours des deux dernières semaines par certains partis politiques et composantes de la société civile opposés aux mesures décidées par le président Kaïs Saïed les 25 juillet et 22 septembre, des milliers de Tunisiens sont descendus dimanche dans la rue pour exprimer leur soutien à Carthage.
Ces manifestations, organisées à l’appel du parti « Echaab », de l’Alliance pour la Tunisie et du courant populaire, ont mobilisé de milliers de Tunisiens qui ont scandé des slogans soutenant les décisions relatives au gel du parlement, au limogeage du chef du gouvernement, à la levée de l’immunité pour les élus, à l’entrée en vigueur de mesures exceptionnelles.
Ces partis ont appelé leurs structures, adhérents ainsi que les forces nationales croyant en la rectification du processus, à participer massivement à des manifestations pacifiques sur l’ensemble du territoire tunisien pour « défendre l’Etat contre la corruption et les magouilles politiques et mettre sur les rails le processus amorcé le 17 décembre 2010 ».
L’appel lancé semble être entendu d’abord à Tunis où l’avenue Habib Bourguiba a connu dès les premières heures du matin un afflux massif de manifestants (jeunes, femmes, hommes). Plusieurs milliers se sont rassemblés en plein centre-ville, où un grand dispositif de sécurité a été déployé, pour exprimer leur appui inconditionnel aux mesures décidées par président de la république à l’effet de « mettre un terme à une gestion mafieuse des affaires du pays, geler le parlement théâtre de luttes politiciennes stériles, et au cafouillage politique créé par une loi électorale, source de conflits récurrents entre les deux têtes de l’exécutif et du parlement ».
Ce qui s’est passé dimanche à l’avenue Bourguiba ainsi que dans les autres régions du pays rappelle quelque part le frémissement que le pays avait connu au cours des premiers jours de la révolution du 14 janvier 2011. Cette fois-ci, les Tunisiens descendent à la rue pour exprimer une colère et surtout leur désaveu à un système qui a failli, à des élus qui n’ont pas été à la hauteur de la confiance placée en eux et à des dirigeants qui n’ont pas pu conduire le changement souhaité.
A l’avenue Habib Bourguiba, où le ministre chargé de l’intérieur Ridha Gharsalloui a inspecté en personne les mesures prises pour éviter d’éventuels débordements, de milliers de personnes se sont rassemblées pour scander presque d’une seule voix leur appui au président tunisien et à toutes les mesures qu’il a décidées.
Au moment où le parti Ennahdha notamment ne cesse d’appeler pour le retour à la légitimité et à la réactivation de l’activité du parlement, les manifestants ont appelé d’une manière énergique la dissolution du parlement, l’engagement de poursuites contre le mouvement Ennahdha, responsable à leurs yeux des assassinats politiques, le non-retour à la constitution de 2014, la poursuite de la lutte contre la corruption et de tous ceux qui ont participé au pillage du pays et la dislocation de ses institutions.
Ces mêmes slogans hostiles au dirigeant d’Ennahdha, Rached Ghannouchi et appelant à l’application rigoureuse de la loi et au renforcement du processus rectificatif de la révolution ont été audibles ailleurs qu’à Tunis.
Des foules nombreuses ont parcouru notamment les rues du Kef, Nabeul, Sousse, Monastir, Kairouan, Gafsa, Sidi Bouzid, Sfax, Tatatouine, Mednine et Djerba répétant un seul mot d’ordre les mêmes slogans et exigeant le non-retour à la situation post-25 juillet 2021.
Ces manifestations de soutien au président tunisien surviennent à la veille de l’annonce de la composition du nouveau gouvernement présidé, pour la première fois, par une femme, Najla Bouden.
Elles témoignent de surcroît de la popularité dont est toujours crédité le président Saïed auprès de l’opinion publique en Tunisie. D’ailleurs le dernier sondage que vient de publier le bureau Emrhod Consulting donne la pleine mesure sur le degré de confiance des Tunisiens en la personne du président Saïed.
En effet, Saied arrive en tête des intentions de vote à l’élection présidentielle avec 71,2% de voix favorables.
Ce capital confiance dont il est crédité lui servira pour mener à bien son projet, non encore totalement dévoilé, notamment le changement du système politique à travers l’amendement de la constitution de 2014, la révision de la loi électorale et, surtout, la mise en œuvre des réformes essentielles pour le sauvetage de l’économie du pays.
Pour cela, le président tunisien, fort des soutiens dont il dispose, vient d’évoquer dans un entretien téléphonique samedi avec le président français Emmanuel Macron qu’un dialogue national s’ouvrirait bientôt réunissant les principales forces politiques et sociales du pays pour engager tous ces chantiers.