C’est un verdict attendu qui est tombé ce vendredi 21 mars. L’agence de notation Moody’s a confirmé la note souveraine du Maroc à Ba1, assortie de perspectives stables. Une décision qui fait suite à une revue périodique tenue le 13 mars dernier et qui reflète, selon l’agence, un subtil équilibre entre les avancées macroéconomiques du Royaume et les défis persistants auxquels il fait face.
Dans son analyse, Moody’s salue la résilience de l’économie marocaine, notamment grâce à des politiques sociales et budgétaires jugées efficaces. Malgré des chocs exogènes répétés – sécheresse, inflation mondiale, tensions géopolitiques – le Maroc a su préserver sa cohésion sociale et soutenir l’activité économique.
Cette stabilité a néanmoins un prix. L’agence souligne une hausse de l’endettement public, conséquence directe des mesures de soutien mises en place. Toutefois, la dette reste jugée soutenable, et la gestion des finances publiques bénéficie toujours d’un certain crédit.
Le déficit budgétaire pour 2024, estimé à 4,3 % du PIB, se révèle légèrement inférieur aux prévisions initiales (4,5 %), porté par des recettes fiscales en hausse. Par ailleurs, les flux touristiques, les exportations dynamiques et les transferts des Marocains résidant à l’étranger ont permis de contenir le déficit du compte courant à un niveau modéré, à 2,5 % du PIB, contre 0,6 % en 2023.
Le revers de la médaille, c’est une croissance économique en berne, freinée en grande partie par la sécheresse. Le PIB du Maroc devrait croître de 2,6 % en 2024, après 3,4 % l’année précédente. Moody’s anticipe toutefois une reprise progressive à moyen terme, avec une croissance moyenne autour de 3,5 %, à condition que les réformes structurelles s’accélèrent.
Mais la fragilité du modèle marocain persiste. L’économie reste trop dépendante des aléas climatiques, avec un revenu par habitant encore inférieur à celui des économies de niveau comparable. L’agence pointe également un marché encore peu libéralisé, dominé par des oligopoles publics, freinant la compétitivité et l’inclusivité de la croissance.
Moody’s accorde au Maroc une note institutionnelle de baa2, saluant la robustesse de ses institutions, la crédibilité de Bank Al-Maghrib en matière de politique monétaire, et la gestion rigoureuse des chocs économiques récents. La politique budgétaire bénéficie également d’un bon niveau de confiance.
Mais des zones de vulnérabilité subsistent. L’endettement en devises atteint 17,6 % du PIB, et bien que ce niveau reste maîtrisé, il expose le pays à des risques de change. Le secteur des entreprises publiques continue, lui aussi, de poser des questions en termes d’efficience et de soutenabilité.
Le secteur bancaire, quant à lui, demeure solide mais confronté à des fonds propres limités, à une concentration des risques et à des expositions internationales complexes, notamment en Afrique subsaharienne.
L’agence reconnaît néanmoins les efforts récents du gouvernement marocain pour lever certains verrous structurels : amélioration du climat des affaires, appui au secteur privé, relance du secteur industriel, soutien à l’emploi formel. Des initiatives qui, si elles sont poursuivies, pourraient renforcer la résilience du pays et conduire à une hausse des revenus et à une réduction des inégalités.
Le développement du secteur non agricole est d’ailleurs identifié comme un levier essentiel. Il permettrait de diversifier les recettes fiscales, de consolider la base productive et d’amorcer une baisse progressive de la dette publique.
En maintenant la note souveraine du Maroc à Ba1, Moody’s envoie un signal de confiance prudente. Pour l’agence, les facteurs positifs – réformes en cours, solidité institutionnelle, stabilité monétaire – viennent compenser les risques latents, qu’ils soient liés à la dette, à la vulnérabilité climatique ou aux rigidités structurelles.
Autrement dit, le Maroc tient le cap, mais le chemin reste semé d’exigences. Pour espérer une amélioration de sa notation à l’avenir, le Royaume devra accélérer ses réformes, diversifier son économie et renforcer sa résilience face aux chocs externes.
La stabilité de la note n’est pas un acquis, elle est un appel à l’action.