La croissance économique du Maroc devrait s’accélérer en 2023, pour atteindre 3,1%, a affirmé, mardi lors d’une table ronde, Javier Diaz Cassou, Economiste senior principal à la Banque mondiale (BM) au Maroc. Diaz Cassou, qui présentait le rapport de la BM relatif au suivi de la situation économique au Maroc Hiver 2022-2023 « Le Maroc face aux chocs d’offres » lors de cette table ronde tenue en présence de Jesko Hentschel, Directeur Pays de la BM pour le Maghreb et Malte, a expliqué que cette croissance serait portée par le rebond du secteur primaire.
Et de poursuivre que ce rapport rappelle que l’économie marocaine a subi, après un fort rebond post-covid-19 l’an dernier, la pression croissante de chocs d’offres caractérisés par une « grave sécheresse couplée à la flambée des prix des matières premières qui ont nourri l’inflation ».
Cependant, a relevé Diaz Cassou, les risques de détérioration persistent en raison des tensions géopolitiques, notamment la guerre en Ukraine, la décélération des principaux partenaires commerciaux de la zone euro et les nouveaux chocs climatiques potentiels.
D’après le rapport de la BM, la croissance réelle du PIB a chuté, passant de 7,9% en 2021 à 1,2% en 2022 (estimation), tandis que le déficit de la balance courante a augmenté de 2,3% à 4,1% du PIB. Comme dans une grande partie du monde, la guerre en Ukraine, conjuguée à la réorganisation des chaînes d’approvisionnement mondiales, a favorisé une forte augmentation du taux d’inflation, l’inflation annuelle marocaine atteignant un pic de 8,3 % à la fin 2022.
« Pour atténuer les répercussions de la hausse des prix des aliments et de l’énergie sur les ménages, le Maroc a adopté une série de mesures, notamment l’octroi de subventions générales sur certains produits de première nécessité et le maintien des prix réglementés préexistants. Cette approche a stabilisé les prix des biens et des services qui absorbent près d’un quart des dépenses moyennes des ménages, évitant ainsi une augmentation plus prononcée de la pauvreté. Cela aura nécessité la mobilisation de dépenses publiques supplémentaires, correspondant à presque 2% du PIB », fait remarquer la BM. Malgré ces mesures, ce sont les ménages modestes et vulnérables qui continuent de souffrir le plus de l’impact de la poussée inflationniste des prix alimentaires et autres prix, souligne ledit rapport qui présente des calculs montrant que l’inflation annuelle a été pratiquement 30% plus élevée pour les 10% les plus pauvres de la population, par rapport aux 10% les plus riches, principalement en raison de l’impact de la hausse des prix alimentaires qui représentent une part plus importante de dépenses chez les ménages les plus pauvres.
Le rapport établit également que la grande réforme de la protection sociale envisagée par le Royaume, permettra le ciblage des aides publiques aux ménages modestes et vulnérables.
Intervenant à cette occasion, Hentschel a affirmé que « les mesures récentes visant à contrer les chocs d’offres et à préserver le pouvoir d’achat des ménages marocains ont atténué l’impact dans une large mesure, et empêché que davantage de personnes ne tombent dans la pauvreté ». « Le déploiement prévu du système d’allocations familiales permettra au Maroc de cibler efficacement la population vulnérable de manière rentable et équitable afin de faire face aux hausses de prix d’une telle ampleur », a-t-il ajouté.
Le rapport note que face à la situation économique actuelle, Bank Al-Maghrib (BAM) a opté pour la prudence en relevant deux fois ses taux d’intérêt depuis septembre 2022, de 100 points de base au total. Le rapport affirme également qu’à l’avenir, la réponse optimale du Maroc en matière de politique monétaire dépendra de la persistance de la pression sur les prix et de l’évolution des prévisions sur l’inflation. Dans un contexte aussi complexe, les autorités pourraient envisager de compléter les mesures anti-inflationnistes en introduisant des politiques structurelles visant à assouplir les contraintes d’offre. Ces mesures pourraient inclure des initiatives ou des actions permettant de remédier aux goulots d’étranglement existants dans les marchés alimentaires, où l’écart important entre les prix à la production et les prix de détail ne se justifient pas toujours par la valeur ajoutée créée dans la chaîne d’approvisionnement.