La discrimination à l’embauche à l’encontre des candidats d’origine maghrébine reste « généralisée » et « persistante » en France, selon une étude publiée mercredi.
A compétences égales, les candidats portant un prénom et un nom à consonance maghrébine ont beaucoup moins de chance d’être contactés par les recruteurs, souligne cette étude réalisée par l’Inter service migrants-Centre d’observation et de recherche sur l’urbain et ses mutations et l’Institut des politiques publiques.
En moyenne, à compétences égales, « les candidats dont l’identité suggère une origine maghrébine ont 31,5 % de chances de moins d’être contactés par les recruteurs que ceux portant un prénom et un nom d’origine française », relève l’étude relayée par le journal Le Monde.
Pour recevoir le même nombre de réponses positives, une personne dont le prénom et le nom sont à consonance maghrébine doit envoyer en moyenne 1,5 fois plus de candidatures qu’une personne ayant le même profil mais dont le prénom et le nom sont à consonance française.
« Les employeurs refusent 20,5 % plus fréquemment les candidatures dont l’identité est à consonance maghrébine que celles dont l’identité est à consonance française », note l’étude.
Intitulée « Discrimination à l’embauche des personnes d’origine supposée maghrébine : quels enseignements d’une grande étude par testing? », cette enquête montre également que la discrimination est environ deux fois plus forte dans les métiers peu qualifiés par rapport aux métiers qualifiés.
L’étude précise en outre que les femmes sont autant concernées que les hommes, et ce, quelle que soit la situation familiale indiquée ou non sur la candidature.
Destinée à mesurer l’ampleur de la discrimination à l’embauche à l’encontre des Maghrébins, un phénomène pointé du doigt par d’autres enquêtes menées ces dernières années, cette nouvelle étude, réalisée entre décembre 2019 et avril 2021, avec une interruption entre mars et juin 2020 (en raison du confinement), s’est appuyée sur la création de candidatures fictives envoyées en réponse à des offres d’emploi réelles.
Quatre candidatures (une féminine et une masculine pour chaque origine supposée – française et maghrébine), soit 9.600 au total, ont été envoyées en réponse à 2.400 offres d’emploi, portant sur 11 catégories de métiers, couvrant l’ensemble du territoire métropolitain et incluant trois tranches d’âge.
Parmi les 2.400 offres d’emploi testées, 1.516 ont donné lieu à un traitement identique de la part des recruteurs : les quatre candidats n’ont reçu aucune réponse, ou les quatre ont suscité un intérêt. Le succès des candidatures a été mesuré à partir du taux de rappel, c’est-à-dire la proportion de candidatures pour lesquelles les employeurs manifestent un intérêt.
Réalisée sous l’égide du ministère du travail, l’étude révèle que lorsque les recruteurs manifestent un intérêt pour 3 CV sur les 4 envoyés, c’est dans 6 % des cas au détriment d’un candidat dont le prénom et le nom sont à consonance maghrébine, contre 3 % pour un candidat au patronyme d’origine française.
De la même façon, lorsque deux candidats sur quatre sont appelés, ceux ayant un nom à consonance française sont privilégiés dans 6 % des cas par rapport aux deux candidats dont le nom a une consonance maghrébine (seulement 1 %). Enfin, lorsque seul un candidat est recontacté (15 % des cas), c’est le plus souvent une candidature suggérant une identité française qui a retenu l’intérêt du recruteur – 11 % des tests – contre 4 % pour les candidats dont l’identité suggère une origine maghrébine.
Selon l’étude, les difficultés de recrutement que connaissent certains secteurs ne parviennent pas à endiguer le phénomène. Elles ne font qu’atténuer les écarts, mais sans les effacer : ainsi, l’écart de taux de rappel est de 26 % dans les métiers qui peinent à trouver de la main-d’œuvre, contre 34 % dans les autres professions.